C'était Hedwige Bienvenu, la chef monteuse de Equipe Cousteau
Par Franck Machu.
Hedwige Bienvenu, décédée en avril 2018, fut la chef monteuse des films Cousteau. Elle fut précédée dans cette tâche par Georges Alépée et John Soh, mais su reprendre le flambeau avec maestria. Lorsque Jacques-Yves Cousteau est à Paris, les deux personnes avec lesquelles il passe le plus de temps à travailler sont Hedwige Bienvenu et Lise Coenca, sa secrétaire.
Les débuts avec Cousteau
Hedwige Bienvenu débute dans le cinéma en 1962, comme script. Elle apprend sur le tas et réalise des stages, puis passe au montage, où elle travaille pour Frédéric Rossiff, le fameux cinéaste animalier. Elle intervient pour la première fois chez Cousteau en 1971, au moment où il réalise les versions françaises des films sur les loutres, les pieuvres et les dauphins. Elle enregistre Philippe Diolé qui a effectué la traduction française des textes américains, donne son avis sur le ton, sur la durée des phrases, et réalise la part purement technique du montage voix-images-musique. Elle refuse pourtant d’entrer à ce moment-là dans l’équipe, et retourne au cinéma traditionnel, travaillant sur des films de long métrage avec Papatakis, Trintignant, Drach. Elle veut rester dans le long métrage et cherche sa voie.
Voyage au bout du Monde
Lorsque Cousteau a besoin d’une monteuse pour le nouveau long métrage sur l’Antarctique, au sein des Requins Associés, en 1975, il fait appel à elle. Même si Marshall Flaum, le producteur américain de la série de l’Odyssée sous-marine, donne son avis sur le montage de ce long métrage de cinéma, il s’agit d’un film entièrement monté en France, auquel Hedwige imprime sa patte. La société de production les Requins Associés se trouve à Neuilly et occupe une petite maison qui comprend le bureau et le secrétariat de Cousteau, trois salles de montage et une salle de projection. « Cousteau était un homme d’image, et en même temps très rigoureux, expliquait-t-elle. Il avait un jugement très sûr pour choisir un plan plutôt qu’un autre ». C’est après « Voyage au Bout du Monde » qu’Hedwige s’engage à fond dans le travail avec Cousteau.
From left to right: Nicola Davso, André Laban, Hedwige Bienvenu, Jean-Claude Boyer, Robert Pollio, François Dorado.
Cousteau et Bienvenu, l'exigence dans le travail
Elle fait la connaissance de l’équipe américaine de Metromedia, John Soh, Marshall Flaum, où une équipe conséquente travaille sur chaque film : un réalisateur de montage, un auteur, un écrivain, un musicien, 2 ou 3 secrétaires de production. Elle apprend et assimile comment ils conçoivent la série. Mais comme elle tient à le rappeler, Cousteau s’est toujours impliqué fortement. Il portait énormément d’attention au sens des textes, à leur musicalité. « Il corrigeait constamment, explique-t-elle. On arrivait à l’auditorium pour enregistrer les commentaires, on avait les images, les textes. Ce qui devait prendre une heure ou deux prenait la journée entière, débordait le soir, parfois la nuit. C’était essentiel pour lui ».
La mémoire des films Cousteau
Hedwige Bienvenu assura la direction de montage de la plupart des films Cousteau produits entre 1975 et 1988, plus de 32 films sont signés d’elle, y compris les films de rétrospective, qui puisent dans les images d’archives jusqu’à 1942. Ayant passé plus de temps à sa table de montage à visionner les images Cousteau que n’importe quelle autre personne, elle incarnait la mémoire des films Cousteau. Sa disparition est une lourde perte. Le sublime « Voyage au Bout du Monde », récit de l’aventure en Antarctique de la Calypso, constitue un des fleurons de son art.
L’Equipe Cousteau se joint à la peine de sa famille et ses amis et leur souhaite toutes nos condoléances.